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Depuis 1987 en France, les entreprises de plus de 20 salariés ont l’obligation de compter 6% de Travailleurs Handicapés parmi leurs effectifs. La loi de 2005 a renforcé cette obligation et a été réformée par La Loi « Avenir Professionnel » du 5 septembre 2018. Entrée en vigueur le 1er janvier 2020, ses effets se font sentir en ce début 2021 par les professionnels de la paie et des ressources humaines. Nous vous proposons dans cet article de faire le point sur cette réforme majeure avec:
1. Le taux d’emploi obligatoire de Travailleurs Handicapés (TH) est-il toujours de 6% pour les entreprises de plus de 20 salariés ?
Oui, ce taux est une nouvelle fois confirmé (ce taux est inchangé depuis 1987). Par contre, ce taux devient révisable (seulement à la hausse) tous les 5 ans.
2. Quand doit-on faire sa DOETH en 2021 pour 2020 ?
La Déclaration de l’Obligation d’Emploi de TH telle qu’on l’a connue n’existe plus. La dernière a été réalisée sur un formulaire Cerfa papier ou télédéclarée au 1er trimestre 2020 (pour l’année 2019).
Désormais et depuis le 1er janvier 2020, toutes les entreprises, qu’elles soient soumises ou pas à l’OETH (c’est à dire toutes les entreprises qu’elles aient plus ou moins de 20 salariés), doivent déclarer leurs TH dans la Déclaration Sociale Nominative (DSN) mensuellement.
Pour les entreprises soumises à l’obligation d’emploi, une déclaration annuelle, en DSN toujours, complètera et régularisera les déclarations mensuelles, et ce, début 2021 pour l’année 2020.
A terme, ces mesures simplifieront la déclaration (l’un des objectifs de cette réforme).
3. Quel est le calendrier ?
Pour cette 1ère déclaration en DSN, la procédure s’étale sur le 1er semestre 2021:
- Fin mars 2021, l’Urssaf notifiera l’effectif moyen annuel de TH.
- En mai 2021 (exigible au 5 ou 15 juin) les entreprises devront déclarer leurs déductions.
- En juin 2021 la contribution nette 2020 sera connue et payée (comme les autres cotisations).
A partir dès 2022, tout sera exigible au 5 ou 15 mars, à déclarer en février donc.
4. Au lieu de l’établissement autonome, c’est désormais l’entreprise (Siren) qui est assujettie : quels effets provoque ce changement ?
En effet, jusqu’au 31 décembre 2019, l’établissement autonome était concerné. Certaines entreprises étaient donc soumises à l’obligation pour leur siège par exemple et pas pour leurs établissements autonomes comptant 10 ou 15 salariés.
Depuis 2020, c’est le n° SIREN qui compte. Les effectifs des établissements autonomes s’additionnent donc désormais à l’effectif du siège et accroissent ainsi l’effectif assujetti et mécaniquement le taux d’emploi de TH baisse tandis que la contribution augmente.
Exemple : Une PME de 250 salariés avec 10 établissements de 15 salariés chacun devait avoir 15 TH pour respecter son obligation d’emploi. Avec la réforme et depuis le 1er janvier 2020, elle doit avoir 24 TH.
5. La réforme renforce l’emploi direct des TH, est-ce un coup d’arrêt pour les Esat ?
L’objectif principal de la réforme est en effet de renforcer, d’encourager et de soutenir l’emploi direct de Travailleurs Handicapés. Mais non, la réforme « n’achève » pas le secteur adapté et protégé, comme on l’entend parfois. Le recours à la sous-traitance est désormais valorisé en euros (déductibilité de la contribution). Cela concerne les Esat, mais aussi les Entreprises Adaptées (EA) ou encore les TIH Travailleurs Indépendants Handicapés (freelances handicapés). 30% de la main d’œuvre est ainsi à déduire de sa contribution Agefiph. Attention, ces déductions sont plafonnées !
6. Quelles autres déductions existent ?
2 autres déductions existent:
- Les « dépenses déductibles » sont déductibles dans la limite de 10% de la contribution. Il s’agit de dépenses faisant partie de 3 catégories : diagnostics et travaux, maintien dans l’emploi et compensation, sensibilisation et formation.
- Enfin, les ECAP (Emplois exigeants des Capacités et Aptitudes Particulières) sont déductibles, sans plafonnement. Il s’agit de 36 métiers que les entreprises ne sont pas obligées de proposer à des TH.
7. Peut-on encore envisager un accord agréé ?
Oui tout à fait. Précédemment les accords agréés (exonération de la contribution Agefiph en contrepartie d’une internalisation du budget et des actions en faveur de l’insertion pro des TH) pouvaient être renouvelés de façon illimitée. L’objectif d’un tel accord est en réalité de démarrer une politique handicap et/ou de la booster. Ces accords sont donc désormais limités à 2 (1 seul renouvellement).
8. Comment calcule-t-on sa contribution Agefiph ?
D’abord, on calcule sa contribution brute, à partir du nombre de bénéficiaires manquants. On multiplie ce chiffre par 400/500/600/1500 (selon la taille de l’entreprise) fois le SMIC horaire brut. On obtient ainsi sa contribution brute. Pour obtenir la contribution nette, on retranche à la contribution brute ses déductions : sous-traitance, dépenses déductibles et Ecap. On obtient alors sa contribution nette.
9. Qu’implique la période transitoire de 5 ans ?
La question 4 nous a permis de voir que les contributions risquaient de fortement augmenter. Ainsi le législateur a prévu des écrêtements évolutifs pendant les 5 premières années afin d’atténuer ces augmentations. En outre, 3 catégories de dépenses déductibles restent provisoirement (là encore jusqu’au 31 décembre 2024) : les partenariats avec les associations, la participation à des évènements en faveur des TH et la professionnalisation des dirigeants ou TH d’Esat-EA-TIH.
10 Comment et pourquoi mettre en place une politique handicap ?
Mettre en œuvre une politique handicap volontariste permet de faire des économies (diminution voire disparition de sa contribution Agefiph) et de respecter ses obligations. Mais elle a aussi d’autres bénéfices cachés : améliorer sa RSE, communiquer à propos de son engagement, mais aussi marque employeur, performance…
Le recrutement de TH est important et c’est souvent à la première action que l’on pense. Pourtant, il est nécessaire de commencer autrement. En effet, pour accueillir de nouveaux collaborateurs TH, les managers, les équipes doivent être sensibilisés un minimum à la question. Par de la formation, des actions de sensibilisation, de la communication interne, on rend son entreprise handi-accueillante. Pour que cela fonctionne, l’implication/impulsion du CoDir est indispensable.
Ces actions mettant en avant un engagement sincère peuvent parfois révéler des RQTH* en interne: ceci libère la parole, rassure, renforce la transparence et peut permettre certains aménagements…
Quand les équipes sont « prêtes », on peut envisager d’accélérer le recrutement de TH avec certaines techniques de recrutement. N’oublions pas en parallèle d’inclure ceci dans sa démarche RSE, dans son management et dans sa marque employeur. On peut également développer la sous-traitance, de façon éthique !
Amandine PILLOT est également formatrice et dirige les formations PAY JOB suivantes: L’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH): Nouvelle version 2021 et Mettre en place une politique handicap dans son entreprise
* Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé